Le pan-génome d’Emiliania déchiffré

Roscoff, Marseille, Paris, le 03 juin 2013

Emiliania est un eucaryote unicellulaire (protiste) photosynthétique, espèce emblématique du phytoplancton marin de part son extrême abondance, son don d’ubiquité, et son micro-squelette calcaire qui rend l’océan blanc-laiteux et visible depuis l’espace lorsque les cellules se multiplient en gigantesques efflorescences. Quatre équipes du CNRS (Roscoff, Marseille, IBENS) contribuent au déchiffrage du génome d’Emiliania, coordonné par Betsy Read (California State University San Marcos), séquencé par le Department of Energy du Joint Genome Institute, et publié dans la revue Nature.

Le génome d’Emiliania huxleyi est 20 fois plus petit que le génome humain, mais il contient pourtant un bon tiers de gènes en plus ! En effet, le consortium de chercheurs international a mis en évidence la présence de plus de 30 000 gènes codant pour toutes sortes de protéines et fonctions, dont plus de la moitié sont totalement inconnues dans les bases de données existantes. Les 13 souches  séquencées en provenance des océans planétaires ne partagent en moyenne que 75% de leur gène, formant le génome-cœur d’Emiliania, entourés de plusieurs milliers de gènes spécifiques à chaque souche (le génome permutable). Une telle variation de contenu génétique souvent rencontrée dans le monde des bactéries, est une première pour un organisme eucaryote sexué. Cette flexibilité génomique inédite d'Emiliania lui confère très probablement une capacité d'adaptation supérieure face aux changements géoclimatiques en cours tels que l'acidification et le réchauffement des océans résultant de l'augmentation de la concentration atmosphérique du CO2.

Emiliania huxleyi, Avec ses 5 micromètres et 70 picogrammes, Emiliania huxleyi est infiniment plus petite et moins lourde qu’Homo sapiens. Or le poids des populations planétaires de ces deux espèces est comparable (±250-350 millions de tonnes!), et le taux de renouvellement de la population d’ Emiliania est infiniment plus élevé que celle des humains, car les cellules peuvent se diviser chaque jour. Ainsi, la petite cellule planctonique de la famille des haptophytes, douée de plusieurs métabolismes fondamentaux (photosynthèse, calcification, production de DMSP, etc.), est un acteur primordial des échanges de carbone et de sulfure entre l’atmosphère et les masses d’eaux océaniques, jusque dans les sédiments marins profonds ou les micro-squelettes d’Emiliania sont les micro-fossiles les plus abondant. Minuscule et délicate, Emiliania est donc une des espèces clef de voûte de notre Biosphère.

En savoir plus:

Emiliania’s pan genome drives the phytoplankton’s global distribution

Read BA, Kegel J, Klute MJ, Kuo A, Lefebvre SC, Maumus F, Mayer C, Miller J, Allen A, Bidle K, Borodovsky M, Bowler C, Brownlee B, Claverie JM, Cock JM, de Vargas C, Elias M, et al., and Grigoriev IV. Nature (june 2013).

Embargo jusqu'au 10/06/2013.

Contacts Chercheurs:

Colomban de Vargas, Evolution des Protistes et des Ecosystèmes Pélagiques, Station Biologique de Roscoff, CNRS UMR 7144, Roscoff.

vargas@sb-roscoff.fr

Mark Cock, Génétique des Algues, Station Biologique de Roscoff, CNRS UMR 7139, Roscoff

cock@sb-roscoff.fr

Jean-Michel Claverie, Information Génomique & Structurale, CNRS-AMU UMR 7256, Marseille.

jean-michel.claverie@univ-amu.fr

Chris Bowler, Institut de Biologie de l'Ecole Normale Supérieure, CNRS UMR 8197, Paris

cbowler@biologie.ens.fr

 

 

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