Parution - CNRS Sept 2016

Salmonella élimine les bactéries de la flore intestinale pour mieux coloniser son hôte

Le tractus digestif de l'homme est recouvert d'une flore intestinale composée de nombreux micro-organismes qui coopèrent ou se font compétition. Cette flore intestinale joue un rôle important en régulant l'absorption des nutriments et en protégeant contre les bactéries pathogènes. Les équipes d'Eric Cascales au Laboratoire d’ingénierie des systèmes macromoléculaires, et de Denise Monack à l’Université de Stanford (USA), montrent que Salmonella, l'agent de la salmonellose, contourne cette protection en utilisant une micro-arbalète pour éliminer les autres bactéries de la flore intestinale et ainsi coloniser l'intestin. Cette étude est publiée dans la revue PNAS.

Dans le corps humain et celui des mammifères, les lumens de l'intestin et du colon sont recouverts d'une flore, essentiellement constituée de bactéries commensales et symbiotes. Il s'agit d'un consortium mutualiste dans lequel les bactéries coopèrent entre elles par l'échange d'informations et de nutriments. La présence de ces bactéries impacte le fonctionnement des cellules intestinales et confère une protection, en limitant les velléités de colonisation des bactéries pathogènes. Les équipes de Denise Monack et d’Eric Cascales montrent que la bactérie pathogène Salmonella enterica Typhimurium, l'agent de la salmonellose, est équipée d'une micro-arbalète lui permettant de délivrer des toxines dans d'autres bactéries, et ainsi les éliminer. Cette micro-arbalète, appelée système de sécrétion de Type VI (SST6), fonctionne par un mécanisme contractile: une flèche se terminant par une pointe est entourée par un fourreau agissant comme un ressort. La contraction du ressort propulse la flèche en direction de la cellule cible. La pénétration de la flèche dans cette cellule permet de la tuer en transperçant sa membrane et en délivrant des toxines.
Les chercheurs montrent qu'une souche sauvage et une souche ne produisant pas le SST6, colonisent l'intestin de souris axéniques, c’est à dire dépourvues de flore intestinale, de manière aussi efficace. Cependant, dans le cas de souris avec une flore intestinale normalement constituée, le mutant SST6 est incapable de coloniser et de provoquer la maladie. Ces résultats démontrent que le SST6 permet à Salmonella de contourner la présence d'une flore intestinale. De plus, les chercheurs révèlent que S. enterica Typhimurium est capable d'éliminer d'autres bactéries commensales du genre Klebsiella et Escherichia dans l'intestin des souris afin de faciliter l'accès aux ressources et la colonisation des cellules intestinales.

Figure : Rôle du système de sécrétion de Type VI chez la bactérie Salmonella enterica Typhimurium. Etape 1. La bactérie S. enterica (bleue) élimine les autres bactéries de la flore intestinale (vert, violet, orange, brun) en injectant une toxine permettant la dégradation du peptidoglycane, à l'aide du système de sécrétion de Type VI (SST6). Etapes 2 et 3. L'élimination des bactéries compétitrices permet un accès privilégié aux ressources et aux cellules épithéliales intestinales. S. enterica va alors coloniser l'intestin et pouvoir exercer son pouvoir pathogène en étant internalisée dans les cellules intestinales.

© Eric Cascales

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Contact chercheur

Eric Cascales 
Laboratoire d’Ingénierie des Systèmes Macromoléculaires
CNRS UMR 7255, Université Aix-Marseille
31 Chemin Joseph Aiguier
13402 Marseille Cedex 20

Tel: 04 91 16 46 63

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